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dimanche 25 janvier 2015

Retour sur la commission Bouchard-Taylor et les accommodements (dé) raisonnables!


Montréal le 24 janvier 2015 
Retour sur les accommodements. (I) 
C’est un sujet inépuisable. 
Il interpelle chacun de nous, que nous soyons campés dans le groupe des laisser-faire-et tout-s’arrangera-avec-le-temps, ou bien que nous soyons du groupe des-intervenants-qui-se-placent-dans-des-positions-difficiles-parce-que-le-sujet-est-chaud-et-difficile. 
Le premier groupe est formé d’une masse critique de braves gens comme on dit, pour qui la vie en société relève d’un état de fait. Apparence que cette société dont ils font partie mollement, n’est en somme qu’une affaire de lieu…où il se passe des choses…auxquelles ils ne peuvent rien. Genre : 
‘’C’est ça qu’est ça ! ‘’ 
Avec un rien de méchanceté grinçante, j’ajouterais que leur situation ressemble plus à l’alignement des légumes du potager, qu’à l’éclosion sauvage mais libre des plantes de la forêt.

En plus d’être très nombreux, ils sont en quelque sorte un terreau où tout peut pousser, le meilleur, le bon, le mauvais, et le pire. Au fond ils ne comprennent rien, ou si peu, du phénomène social qui les fait et les anime. Ce sont plus ou moins des individus. Ils forment des foules immenses, qu’on qualifie parfois de termes étranges, comme ‘’majorité silencieuse’’ (dans lequel terme de ‘’majorité-qui-ne-s’exprime pas’’) on peut mettre tout et son contraire. Au fond ça ne veut strictement rien dire. C’est du je-m’en-foutisme, de la démission, quand ce n’est pas de l’ignorance pure et simple.
Puis il y a ces groupes, ces partis politiques, ces organisations, ces cénacles, ces sortes de thinktanks, qui comme leur fonction l’indique sont organisés. Ils travaillent à la promotion de leurs vues (pas toujours bonnes, pas toujours mauvaises) sur ce que doit être une société. Ce sont les artistes et créateurs. Ce sont les organismes qui prônent une vision articulée de la société. Ils sont réformateurs, utopistes, intellectuels, citoyens participants, coopérants ou adversaires. Ils ont en commun d’être intéressés et comment ! Ils se démènent, posent des gestes, se mêlent aux débats, s’activent publiquement. Au contraire du groupe précédent qui subit passivement.
Il est évident pour quiconque sait observer, que ce sont les gens de ce deuxième groupe qui font la société et l’imposent (pour le meilleur et pour le pire) à l’ensemble social.
Dans des articles précédents, que l’on peut retrouver ici sur mon blogue, j’ai longuement épilogué à l’époque sur la Commission Bouchard-Taylor. Dont je pensais beaucoup plus de bien que de mal. En résumé, j’ai dit à l’époque de son itinérance à travers le Québec, que ce qui faisait sa valeur était justement qu’elle existait, et permettait à d’innombrables groupes et de citoyens, de particuliers, de faire valoir leurs idées, leurs attentes, leurs visions, leurs angoisses, leurs espoirs, au sujet de la nation au sein de laquelle ils évoluent. Cette commission a fait ressortir au grand jour des contradictions, des préoccupations, qui pouvaient enfin s’exprimer. Il était temps.
Là était le mérite de cette commission. Celui de permettre de poser de vraies questions au sujet de préoccupations collectives inquiétantes. J’ai dit aussi et je le répète ici, que je n’étais pas d’accord avec les conclusions et recommandations de cette commission qui par ailleurs, dans son rapport final, mettait tout de même l’accent sur des enjeux réels. Et proposait aussi quelques pistes de solutions dignes d’intérêt.
Depuis, des gouvernements et des instances aveugles au sens commun, ont mis le couvercle sur ce chaudron bouillonnant, et maintenant la pression monte. Nous avons l’air de fous qui parient sur la vitesse d’un train emballé, dans lequel nous prenons place, et qui va dérailler au prochain tournant, emporté par les lois de la physique.
La preuve en est que les débats de l’époque (on parle ici d’une époque très récente) reviennent maintenant à la une de l’actualité, avec un redoublement d’urgence impatiente, au milieu de confrontations internationales qui font quotidiennement dans l’horreur. Et qu’il se trouve encore des instances (responsables???) qui refusent d’en débattre. On pratique volontiers en hauts lieux la politique de l’autruche.
Les débordements ethniques (surtout religieux) sont partout, et provoquent des accrochages qui semblent pour le moment si compliqués, qu’on en vient à se dire qu’ils sont et seront insurmontables. De là à baisser les bras dans la recherche du vivre ensemble, et de constater qu’il vaut mieux en découdre par la force, il n’y a qu’un pas. Celui-ci est de plus en plus franchi par des citoyens (et des états) exaspérés, qui redécouvrent maintenant de vieux réflexes xénophobes.
Qu’on me comprenne bien, cette xénophobie n’est pas nouvelle. Elle est de toutes les époques et s’exprime sous divers aspects. Elle prend selon les temps et les mœurs une couleur linguistique, religieuse, sexuelle, sociale (affaire de classe) dépendant des tendances plus ou moins exacerbées du moment. On y trouve des effets de mode, des contraintes culturelles inquiètes, qui s’expriment par bien des refus. Ou encore par cette sorte de tolérance larvée qui n’est rien d’autre que de l’attentisme méprisant.  
Au Québec, nous sommes conscients des défis que pose l’immigration, et on s’interroge ouvertement sur ses conséquences. Ce qui nous vaut parfois d’être montrés du doigt par des gens insignifiants, dont le propos, pour être enveloppé de bons sentiments vides de sens, n’en est pas moins l’expression d’une ignorance crasse. D’autant plus redoutable que ces imbéciles qui jouent avec le feu, s’ils ne sont souvent que des inconscients, ont du pouvoir et de l’audience.
Je vise ici plus particulièrement certaines publications anglo-canadiennes dont (The Gazette de Montréal) et certains instituts pédants comme (l’Institut Fraser de Vancouver) qui nous dénoncent chaque fois que l’on cherche à définir notre mieux vivre ensemble.
Ces bouteurs de feu ne sont pas les seuls de leur espèce. Que le Canada-anglais nous donne des leçons sur quoi que ce soit qui touche l’organisation d’une société équilibrée, est un comble d’aveuglement et de bêtise. Dans un pays (ben oui le Canada, pour ne pas le nommer) où le mépris de l’autre est la règle commune ...nous en savons quelque chose. 
Qu’il y ait au Québec des voix (heureusement parcimonieuses et peu influentes) qui écoutent et commentent ces sornettes, est quelque chose dont l’indigence en matière d’intelligence est suffisamment évidente, pour que j’évite ici d’en rajouter : 
‘’ Les chiens aboient, la caravane passe ‘’. (Proverbe arabe).
Dans ces sphères hautaines farcies de préjugés, où on pratique la parole onctueuse et mielleuse, l’analyse ampoulée mêlée de vieux relents sacerdotaux, on y prêche en somme la tolérance de son voisin, de ses voisins, non pas parce qu’on les respecte pour ce qu’ils sont, mais parce qu’on s’en méfie, qu’on les craint, qu’on les surveille. Et surtout parce qu’on souhaite leur assigner une niche sociale où ils n’embêteront personne. Dans ces enclaves fortifiées de bien-pensants, on n'y mélange pas les serviettes et les torchons.
C’est là tout le drame du multiculturalisme, du communautarisme, procédés malsains entre tous, qui empêchent la fabrication d’un tissus social coloré certes mais cohérent, et favorise au contraire les replis, les ghettos, l’indifférence, voire la suspicion, et éventuellement la haine. 
Seule… je devrais dire meilleure façon d’empêcher ces replis néfastes…il y a la Société Civile (d’autres disent Laïque) qui établit un cadre général de participation à l'usage des citoyens, et impose plus de devoirs et de responsabilités à ceux-ci, qu’elle n’accorde de privilèges ou de droits confus à des particuliers fâcheusement vociférateurs. Totalement intolérants face aux autres, qui pratiquent l’intimidation, tout en se faisant passer pour de prétendues victimes.
À suivre…
Julien Maréchal